Consacré aux Formes de l’énergétisme et leur influence sur la pensée, ce second volume clôt le diptyque publié sous le titre générique : Énergie, science et philosophie au tournant des XIXe et XXe siècles, diptyque dont le premier volet retraçait, quant à lui, l’émergence du concept d’énergie à la confluence des idées sur le mouvement et sur la chaleur. – Ce second volume relate comment, au tournant des XIXe et XXe siècles, les bouleversements s’étendirent à la Philosophie, aux Lettres et aux Arts. Car la notion d’énergie, reconnue commune à tous les phénomènes physiques et à ceux qui en dépendent, fut intégrée à plusieurs niveaux : d’abord comme représentation du monde concret, puis comme représentation de l’imaginaire. Un exemple particulier est donné : celui de la Russie qui fut totalement perméable à l’énergétisme. Véhiculé par des intellectuels notoires, et relayé par des membres éminents du parti communiste, l’énergétisme y arriva sur un terrain préparé par le mysticisme scientifique et la culture religieuse orthodoxe. Il stimula les conceptions ésotériques et se constitua en un véritable système de pensée. La période fut riche en doctrines philosophiques inspirées par le concept d’énergie : le phénoménisme, la pensée économique et sociale de Cournot, les conceptions énergétistes de Spencer, le matérialisme vulgaire et le matérialisme dialectique, ou encore le monisme énergétique qui est à la base de l’idéal chimérique du surhomme de Nietzsche, de l’énergie spirituelle de Bergson et de la tentative d’atténuation des clivages entre idéalisme et réalisme de Le Roy. La conception du rapport physique entre énergie et matière et la réunion des deux concepts en un seul par Einstein conclut naturellement cette réflexion philosophique sur l’énergie.
M.-M. V.