L’auteur entend ici replacer la pensée
de Diogène sur la causalité dans son contexte historique, en relation, en
amont, à Anaximène
et, en aval, à Aristote. Contre Graham[1], qui distinguait le « monisme matériel » de Diogène de
la « théorie de la substance générative » d’Anaximène, Reece soutient
que les raisons qui nous conduisent à admettre (ou au contraire à contester) la
présence d’un monisme matériel dans leur pensée valent identiquement pour le
maître et pour le disciple supposé. Bien loin de se distinguer, les deux
philosophes prennent selon lui le même parti dans le débat avec les éléates,
au sujet de l’existence du changement. Par ailleurs, Reece soutient que la mise
en évidence par Diogène d’un «principe» explicatif des phénomènes naturels répond
au même objectif méthodologique que celui qui sera ensuite affirmé par
Aristote, à savoir garantir une forme d’uniformité entre les réalités, de sorte qu’elles
puissent agir les unes sur les autres. Mais le Stagirite ne retient de Diogène
que l’idée d’un «principe génératif unique» (qu’il prolonge et
complexifie dans sa théorie du substrat) et récuse l’affirmation d’une
« identité d’essence » (qui conduit Diogène à embrasser un monisme
aérien). Le philosophe d’Apollonie apparaît en somme comme une première étape
dans la résolution aristotélicienne du problème de la causalité.
L. M.
[1] D. W. Graham, Explaining the Cosmos: The
Ionian Tradition of Scientific Philosophy, Princeton,
Princeton University Press, 2006.