Comment penser le pluralisme dans les sciences et comment le faire vivre ? Quelles sont les conséquences effectives de la reconnaissance d’un tel pluralisme ? Quel type de responsabilité engage-t-il ? Animé d’une ambition subtile – ni positiviste, ni relativiste, ni non plus éclectique – l’auteur de cet ouvrage (qui est issu d’une conférence donnée à l’occasion du 20e anniversaire du groupe Sciences en questions) nous livre l’argumentaire solide, concis, structuré et illustré par de nombreux exemples concrets (OGM, Alzheimer, tremblement de terre de la ville d’Aquila, etc.) d’une posture épistémologique originale (promise à un avenir rayonnant) conforme à la réalité structurelle de la science au XXIe siècle : l’ « épistémologie impliquée ». À partir d’une caractérisation pluraliste de la science (dans sa disciplinarité, ses styles, ses méthodes, ses valeurs et ses temporalités de recherche), l’auteur propose une critique argumentée des concepts d’autonomie, d’impartialité et de neutralité, constitutifs de l’idéal de la science traditionnelle, afin d’expliciter, sur la base du pluralisme exposé et revendiqué, ce qu’il entend par « science impliquée », à savoir : « une science qui tient sa pertinence à sa tolérance au pluralisme et aux valeurs et donc qui abandonne son idéal d’autonomie et de neutralité sans abandonner son exigence d’impartialité. »
(p. 39) À la triade axiologique autonomie/impartialité/neutralité de l’idéal de la science traditionnelle, l’auteur propose donc de substituer la triade axiologique fécondité/impartialité impliquée/responsabilité impliquée de la science impliquée. Dès lors, il dégage un nouveau concept de responsabilité, connexe à une science véritablement impliquée : celui de « responsabilité épistémique », qui n’est ni la responsabilité juridique, ni la responsabilité morale, mais la responsabilité sociale et politique nécessairement collective, liée à la pertinence de savoirs produits et mobilisés en contexte, de façon concertée. Ni compliquée, ni appliquée, ni expliquée, ni dupliquée, la science « impliquée » est démocratique, pluraliste, critique et responsable : elle forme la conjointure de ces différentes postures. Le lecteur trouvera en complément de l’essai de Léo Coutellec la transcription de la discussion ayant suivi la conférence dont il est issu. – Discussion, p. 59-76 ; Références bibliographiques, p. 77-82 ; Table des matières, p. 83 ; Ouvrages parus dans la même collection, p. 85-87.
F. F.