Arnold Van Gennep

Du folklore à l’ethnographie

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Collectif

  • Pages : 373
  • Collection : Le Regard de l’ethnologue
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  • Édition : Originale
  • Ville : Paris
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  • ISBN : 978-2-7355-0856-3
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  • Date de création : 06-01-2021
  • Dernière mise à jour : 21-06-2023

Résumé

Français

[Ouvrage collectif sous la direction de Daniel Fabre & Christine Laurière]. – Arnold Van Gennep est un ethnologue qui fut à l’origine des travaux d’ethnographie appliquée aux sociétés européennes et, dans son cas, de la France. Son Manuel de folklore français contemporain (3 vol. 1937-1958), fruit de plus de 20 ans de travail, fait référence dans le domaine. Son œuvre, des Rites de passage (1909)jusqu’au Manuel, est l’objet depuis 25 ans de rééditions multiples. Elle est analysée par de nombreux travaux universitaires cherchant à retracer la trajectoire du personnage, depuis sa formation à l’EPHE sous la houlette de Léon Marillier jusqu’à son atterrissage institutionnel tardif et somme toute fragile (il faut attendre la création du CNRS et l’après-guerre pour cela). Le rôle de Van Gennep dans la constitution de l’ethnologie de la France dans la première moitié du XXe siècle est pourtant attesté. L’ouvrage propose ainsi, à la suite du colloque tenu en octobre 2011 à l’École des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) sous l’intitulé « Arnold Van Gennep (1873-1957). Terrains, oppositions, réseaux », un « essai de biographie collective » (Introduction, p. 9), afin de mettre en lumière « de façon critique et circonstanciée, le champ des oppositions dans lequel évolua Arnold Van Gennep » (Ibid.). À travers Van Gennep c’est en effet le passage à la science et à l’autonomie d’une discipline, l’ethnographie et l’ethnologie des sociétés européennes, qui peut se lire. Discipline longtemps tenue dans l’ombre d’une part de l’ethnologie « exotique » (l’ethnologie se définissant par l’étude du lointain plutôt que du proche, l’étude du fonctionnement des sociétés extra-européennes plutôt que des manières d’être dans les milieux sociaux les plus variés d’univers plus familiers et européens), d’autre part de sa devancière « le folklore » dont elle hérite et qu’elle cherche à mieux définir sans en abandonner le nom dans un premier temps, elle eut à batailler pour définir ses méthodes et ses objectifs indépendamment de trois disciplines voisines : l’histoire, la sociologie (en particulier durkheimienne), l’anthropologie physique de la Société d’anthropologie.« Dissident structurel » (désignation proposée par une contributrice de l’ouvrage, Emmanuelle Sibeud), dissidence en partie redevable d’une philosophie de vie anarchiste tôt adoptée par l’auteur des Rites de passage, VG agit comme le révélateur du développement de la photographie argentique, faisant apparaître par ses prises de position, qui lui valent reconnaissances ou exclusions, les grandes masses qui déterminent les forces et centres de gravité du champ des sciences de l’homme en cours de professionnalisation et d’institutionnalisation à la fin du XIXe et tout au long de la première moitié du XXe siècle. L’ouvrage se propose ainsi de suivre la vie de Van Gennep en quatre temps qui sont aussi quatre confrontations à des domaines disciplinaires où se taillent peu à peu les contours de l’ethnologie des sociétés européennes. La première partie (« Interroger la pensée primitive ») revient sur la formation de Van Gennep chez les historiens des religions, en particulier à l’EPHE et, au sein de celle-ci, le rôle qu’a pu y jouer Léon Marillier (Giordana Charuty). On y suit les premiers travaux de Van Gennep sur les naissances vierges (Frederico Delgado Rosa) ou sur le totémisme (André Mary). La deuxième partie (« Chroniques de la vie d’un ethnographe ») revient sur les difficultés (personnelles et académiques) qu’a rencontrées Van Gennep à l’orée de sa carrière académique : l’échec d’une inscription académique en Suisse où son poste à Neuchâtel lui est retiré pour des raisons politiques (Serge Reubi), la difficulté de faire jouer les réseaux ministériels et ceux de l’administration coloniale pour développer une ethnologie à sa convenance (Emmanuelle Sibeud), les résultats en demi-teinte de l’enquête de terrain en Algérie menée en 1911 (François Pouillon). La troisième partie (« Ethnologie, folklore, histoire ») montre un Van Gennep qui rompt avec son intérêt pour l’ethnologie des domaines extra-européens (Madagascar, Australie, Algérie) pour se consacrer à la constitution de l’ethnologie de la France. Van Gennep participe ainsi de ce moment de réappropriation scientifique du folklore où il se trouve en conflit avec des chercheurs comme Saintyves ou Varagnac (Arnauld Chandivert). L’enjeu de ce développement du folklore se double d’une attention aux arts et traditions populaires se difractant en querelles de méthode et de mises en œuvre de la discipline, en lien notamment avec la dimension muséographique ou de recherche que doit adopter le domaine (Daniel Fabre, Sylvie Sagnes). Il faut une étude fine des réseaux et une dimension d’anthropologie et sociologie des pratiques savantes pour suivre l’évolution de la discipline, ce qu’offre la quatrième et dernière partie de l’ouvrage (« Des réseaux savants rivaux »). L’ouvrage éclaire ainsi les différents liens qui font la vie d’un chercheur et l’histoire de sa discipline. L’ouvrage aborde ainsi le lien et les trajectoires différenciées de Mauss et Van Gennep (Christine Laurière), la constitution des études folkloriques en France de la fin des années 30 jusqu’à la fin de la vie de Van Gennep (et au-delà) via la figure d’un personnage secondaire mais pivot qui a laissé une riche documentation, Roger Lecotté (Nicolas Adell). Enfin l’ouvrage met en lumière les liens de Van Gennep avec les cercles anarchistes par où se jouent d’autres développements de la discipline (Jean-Paul Morel). Un chapitre épilogue portant sur le statut de classique acquis au fil du temps par Les Rites de passage vient clore ce parcours d’une vie de savant par où se découvre la vie d’une discipline (Thierry Wendling). – Portrait de Van Gennep, p. 4 ; Introduction, pp.5-20 ; Parties I à IV + épilogue, pp. 21-341 ; Bibliographie, pp. 343-361 ; Repères bio-bibliographiques, pp. 363-366 ; Présentation des auteurs, pp. 367-371 ; Table des matières, pp. 372-373.

V. B.

Article(s)

Introduction : Arnold Van Gennep, passeur aux gués de l’ethnographie

LAURIÈRE Christine

pages 5 à 20


Un ethnographe chez les historiens des religions

CHARUTY Giordana

pages 21 à 42


« Lucina sine concubitu ». Ethnographie et théorie de l’immaculée conception chez Van Gennep

DELGADO ROSA Frederico

pages 43 à 70


Le totémisme vrai et vivant de Van Gennep

MARY André

pages 71 à 95


Un homme pressé. Arnold Van Gennep, l’indépendance de l’ethnographie et le congrès de Neuchâtel

REUBI Serge

pages 99 à 115


Arnold Van Gennep, ethnographe officiel des colonies ? Ethnographie et réformisme colonial en France avant 1914

SIBEUD Emmanuelle

pages 117 à 131


En Algérie : le détour exotique d’Arnold Van Gennep

POUILLON François

pages 133 à 166


Luttes de définition autour de la notion de folklore. Van Gennep, Saintyves, Varagnac (1910-1950)

CHANDIVERT Arnauld

pages 171 à 187


Daniel Fabre, « La question de l’art populaire : quête, enquêtes »

FABRE Daniel

pages 189 à 203


Van Gennep en pays de dissidences

SAGNES Sylvie

pages 205 à 221


Van Gennep et Marcel Mauss. Frères ennemis en ethnographie

LAURIÈRE Christine

pages 225 à 259


Esprit(s) de folklore(s). Georges Henri, André, Arnold…et les autres au prisme de Roger Lecotté

ADELL Nicolas

pages 261 à 288


Pour un folklore vivant aux racines du peuple. Van Gennep et Henry Poulaille, convergences anarchistes

MOREL Jean-Paul

pages 289 à 311


Relire Les Rites de passage. Qu’est-ce qu’un classique en anthropologie ?

WENDLING Thierry

pages 313 à 341