Le mouvement général des sciences est de fournir les moyens théoriques d’une reconstruction des phénomènes, en élaborant des lois explicitant leurs régularités sous-jacentes. L’attitude générale des sciences repose aujourd’hui sur l’a priori des déterminismes, quelque soit leur forme. Dans ses rapports au monde, la pensée humaine est une confrontation permanente aux systèmes complexes dont chacun possède une histoire propre qui le rend singulier, système autonome avec ses lois et ses degrés de liberté interne. Quand il s’agit de penser l’être humain, la tentation est plus forte encore de lui prêter un libre arbitre. La question fondamentale est donc celle de la compatibilité entre la pensée scientifique en quête de déterminismes, et la compréhension des complexités, génératrice d’indéterminismes. Comment obtenir une conciliation quand, de la physique à l’éthique, en passant par la cellule biologique, les êtres multicellulaires et les sociétés, on remonte les niveaux d’organisation ? Peut-on y parvenir quant à l’être humain et la société sans remettre en question certains aspects cruciaux comme la responsabilité et l’éthique ? Le but est ici de revisiter ce débat fondamental, auquel Henri Atlan a consacré une grande partie de son œuvre, en s’appuyant, d’une part, sur les approches récentes de la modélisation des systèmes complexes et, d’autre part, sur la tradition philosophique multimillénaire.
M.-M. V.