Le présent ouvrage est issu du séminaire commun de L.-A. Gérard-Varet et J.-C. Passeron, qui s’est tenu à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales à Marseille (Vieille-Charité) en 1988-1989, 1989-1990 et 1990-1991. – Dans le débat sur le rôle du principe de rationalité dans la connaissance des actions humaines, le choix a été fait ici de restreindre les questions posées au principe de rationalité en puisant leur formulation dans l’actualité méthodologique de la recherche. En quel sens les différentes sciences sociales usent-elles aujourd’hui du principe de rationalité pour analyser, interpréter et expliquer les conduites ? Ce principe garde-t-il quelque unité théorique dans la diversité des méthodologies qui le mettent en œuvre comme principe d’intelligibilité anthropologique, de calcul ou de prévision des décisions, de recherche des équilibres interactifs ou de formulation de l’équité sociale ? Les limites que rencontre l’application du principe de rationalité aux actions sociales, comme ses formulations récentes introduisant les notions de rationalité limitée ou procédurale, sont-elles les mêmes pour une science du «modèle» comme l’économie ou une science de l’«enquête» comme la sociologie. Plus généralement, utilise-t-on la même définition opératoire de la «rationalité» dans l’analyse d’un équilibre ou d’une conjoncture, d’un contexte ou d’une interdépendance entre variables, d’une synchronie ou d’une diachronie; dans un récit ou dans une comparaison statistique, dans une décision politique ou dans une anticipation économique, dans un calcul des moyens ou dans une supputation des fins, dans la théorie des jeux ou dans une typologie historique ?
M.-M. V.