Science, philosophie, société

4e congrès de la Société de Philosophie des Sciences

Envoyer le lien

Collectif

  • Pages : 180
  • Collection : Sciences : concepts et problèmes
  •  
  • Support : Document imprimé
  • Format : 16*22 cm
  • Langues : Français
  • Édition : Originale
  • Ville : Besançon
  •  
  • ISBN : 978-2-84867-596-1
  • URL : Lien externe
  •  
  • Date de création : 21-12-2017
  • Dernière mise à jour : 26-04-2022

Résumé

Français

Cet ouvrage collectif regroupe des contributions variées qui ont en commun, comme l’indique son titre, d’interroger la conception traditionnelle d’une science largement autonome de la société, et le rôle que la philosophie des sciences peut jouer pour faire le pont entre ces deux notions. Il s’inscrit dans la continuité du mouvement de « recontextualisation » de la science initié par les Science and Technology Studies (STS), qui a mis en évidence une double transformation : du mode de production des connaissances scientifiques d’une part, et des besoins et attentes de la société vis-à-vis des sciences d’autre part. En ce qui concerne le premier point, l’introduction propose à la philosophie des sciences de critiquer la « rupture d’époque » thématisée dans les STS (du point de vue descriptif), voire (du point de vue normatif) d’étudier dans quelle mesure ces transformations du mode de production des connaissances scientifiques sont souhaitables (par exemple en ce qui concerne la marchandisation ou l’autonomie de la recherche). La perméabilité de la science aux valeurs sociales, politiques et culturelles constitue également un objet d’étude pour la philosophie des sciences. En ce qui concerne le deuxième point, la demande croissante d’expertise scientifique de la part de la société nécessite d’interroger le statut de l’expert et de l’expertise, ainsi que la responsabilité sociale du scientifique, ou encore la participation éventuelle des citoyens dans la gouvernance de la science. Les différents articles de cet ouvrage collectif présentent ainsi des suggestions pour le rôle que peut jouer la philosophie des sciences dans cette nouvelle relation science-société. J. Kourany aborde le débat sur l’augmentation humaine – l’amélioration ou la transformation de l’humain par la technologie. Elle explique que le philosophe des sciences peut aider à préciser ce débat du point de vue empirique et normatif, en analysant les rapports risques/bénéfices, les valeurs invoquées et leur soubassement empirique, et en évaluant dans quelle mesure la recherche sur l’augmentation humaine est socialement responsable. J. R. Brown s’intéresse au programme mondial d’éradication de la variole, qui constitue un exemple d’étude des relations entre science moderne et connaissances « traditionnelles ». Il montre que l’épistémologie analytique l’aborde de façon simplificatrice, car elle ne prend pas suffisamment en compte la réalité historique, et les dimensions technologique, politique et sociale de son implémentation en Inde (cas traité en particulier par l’article). S. Ruphy critique l’idée selon laquelle l’autonomie de la science vis-à-vis de la société garantirait son utilité, épistémique comme pratique, notamment car elle garantirait son bon développement, ainsi que son impartialité. Elle examine quelles formes de limitation de l’autonomie de la science sont épistémologiquement acceptables et socialement souhaitables. Elle critique enfin les formes existantes de limitation, pour conclure en faveur d’un tournant « naturaliste » et « localiste » de la philosophie politique des sciences. S. Turner interroge la notion de « consensus » en science. Il oppose la science académique et la science « post-normale » d’après-guerre, qui n’obéit plus aux normes mertoniennes de la première. Leurs « heuristiques collectives » diffèrent : la première est étrangère à la notion de consensus, tandis que la seconde pose la question de la « compétence sur la compétence » de scientifiques amenés à intervenir au-delà de leur domaine de spécialisation. Les sciences du climat fournissent un exemple de science post-normale, orientée par le politique et visant l’obtention d’un consensus. É. Giroux défend le maintien de la distinction médicale traditionnelle entre normal et pathologique, brouillée par la notion de (facteur de) risque, qui étend le champ du pathologique de manière indéfinie. Elle se base sur une analyse de la littérature philosophique analytique, sur une analyse historique et épistémologique du normal et du pathologique (en prenant l’exemple de l’hypertension et de l’hypercholestérolémie), et sur une analyse ontologique du concept de risque. À travers l’exemple des mécanismes de déclenchement du cancer, R. Le Roux s’intéresse à la recherche biomédicale prétendument a-théorique (sans hypothèse), qui ne serait guidée que par le développement technologique. En étudiant les technologies existantes, les controverses entre chercheurs et l’utilisation des instruments, il montre que la technologie ne se développe pas dans un vide théorique ou un empirisme pur, mais se base sur des représentations a priori. K. A. Peacock soutient que la (haute) technologie, ainsi que l’ingéniosité humaine, sont nécessaires pour réaliser la symbiose mutualiste préconisée par Leopold entre l’Homme et le système terrestre. Selon lui, un mode de vie durable pour l’Homme sur Terre sera forcément symbiotique, et nécessitera une haute technologie. La créativité humaine peut résoudre le problème du taux de retour énergétique et de la qualité de l’énergie nécessaires à une culture technologique non basée sur la seule énergie fossile. J. Jebeile soutient que les manquements mis en évidence dans le rapport sur l’accident de la centrale de Fukushima sont inévitables dans un système aussi complexe qu’une centrale nucléaire. Elle montre notamment que les erreurs individuelles inévitables, le cloisonnement scientifique des individus et la non-conservation du savoir-faire accumulés dans le temps empêchent un collectif d’atteindre un contrôle épistémique optimal sur une machine nucléaire. J.-M. Chevalier conteste la conception commune du rapport de Peirce aux sciences sociales. Il montre que Peirce a théorisé les croyances, la vérité et la logique comme intrinsèquement sociales ; qu’il s’est intéressé aux méthodes scientifiques d’analyse de la société ; et que sa théorie de la communauté s’accompagne d’une demande de justice sociale conforme à sa conception anti-utilitariste.

Ph. S.