Cybernétique

Information et régulation dans le vivant et la machine

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Monographie

  • Pages : 371
  • Collection : Sources du savoir
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  • Support : Document imprimé
  • Format : 21 cm.
  • Langues : Français
  • Édition : 1re traduction française
  • Ville : Paris
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  • ISBN : 978-2-02-109420-6
  • URL : Lien externe
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  • Date de création : 04-12-2014
  • Dernière mise à jour : 20-04-2021

Résumé

Français

Alors même qu’il avait paru pour la première fois en 1948 chez un éditeur français, ce livre mythique ne disposait toujours pas d’une traduction française jusqu’en 2014. C’est maintenant la cas, grâce au travail accompli par Ronan Le Roux, Robert Vallée et Nicole Vallée-Lévi, traducteurs qui ne se sont pas simplement contentés de produire une traduction, mais ont réalisé un travail de réédition incluant un véritable appareil critique (voir en particulier la longue présentation française rédigée par Ronan Le Roux et l’ensemble des notes en bas de pages de ce travail de réédition). De facture encyclopédique, non par sa longueur, mais dans l’articulation de ses matières et par la variété des connaissances de première main qu’il mobilise (en mathématiques, physique, physiologie, ingénierie, philosophie, biologie, psychologie), l’ouvrage est à la fois un bilan des recherches commencées par l’auteur à la fin des années 1930 avec le physiologiste mexicain Arturo Rosenblueth (en collaboration avec les plus grands savants de la première moitié du XXe siècle), une histoire à chaud des origines de la cybernétique (l’ouvrage est rédigé en seulement trois mois durant l’année 1947) et un plaidoyer pour la recherche interdisciplinaire, solidement soutenu par une profonde réflexion collective sur la méthodologie scientifique de cette interdisciplinarité, alors activement expérimentée, pratiquée et théorisée par l’auteur (ses recherches ayant produit des résultats positifs et des résolutions de problèmes à la fois théoriques, techniques et pratiques). Une analyse comparative de l’astronomie et de la météorologie visant à mettre en évidence les différences entre la physique moderne et la physique contemporaine (celle du XXe siècle), entre la mécanique newtonienne et la mécanique statistique, entre la réversibilité du temps astronomique et l’irréversibilité du temps météorologique, fait l’objet de la première étude de l’ouvrage. Wiener y esquisse un schéma de corrélation historique entre science et technique, la technique étant le miroir réfléchissant de la pensée d’une époque, et la pensée technicienne, toujours productrice d’un analogon fonctionnel de l’organisme vivant (Golem, automate de Vaucanson, machine à vapeur, automate mécanique, automate électronique, servomécanisme, etc.). Or l’étude des automates sensibles indique selon Wiener que leurs mécanismes sont étroitement liés à un temps qui relève plus de la mécanique statistique que de la mécanique classique, amenuisant ainsi la différence entre mécanisme et vitalisme : autrement dit, entre temps des organismes vivants et temps des automates sensibles (chapitre 1 : « Temps newtonien et temps bergsonien »). Dès lors, Wiener enchaîne son propos sur la complémentarité entre la théorie de la mesure de Lebesgue et la mécanique statistique de Gibbs : on comprend ainsi comment le développement de la théorie ergodique a permis d’établir le fondement mathématique exact de la mécanique statistique (chapitre 2 : « Groupes et mécanique statistique »). Or il s’avère que le problème de la prédiction, que Wiener avait étudié durant la seconde guerre mondiale (pour élaborer un dispositif de tir anti-aérien) est lié à la statistique des séries temporelles (théorie des messages). C’est pourquoi le troisième chapitre («Séries temporelles, information et communication») est consacré à la mécanique statistique des séries temporelles : Wiener y présente d’une part la définition mathématique de la notion d’information, son explicitation ainsi que la technique de sa mesure ; d’autre part sa forme homogène dans le temps. Terminant ce troisième chapitre sur la mécanique quantique, Wiener montre ainsi comment la pénétration de l’étude des séries temporelles dans la physique du XXe siècle a induit son basculement progressif vers un paradigme probabiliste. Les problèmes d’ingénierie de la commande et de la communication s’étant révélés inséparables, les travaux menés avec Julian Bigelow conduisirent Wiener à puiser le schème de son dispositif de prédiction dans le paradigme des comportements téléologiques et des processus neurophysiologiques contrôlés par rétroaction. La théorie du fonctionnement d’un dispositif de rétroaction fait donc l’objet du chapitre 4 (« Rétroaction et oscillation ») ; celle du fonctionnement d’une machine à calculer, l’objet du chapitre 5 (« Machines à calculer et système nerveux ») dans la mesure où une telle machine présente une analogie opératoire avec le système nerveux (cas particulier de réalisation concrète d’une machine logique). La comparaison du fonctionnement d’un calculateur électronique avec celui d’un système nerveux devant selon Wiener – et tel est l’enjeu de ce cinquième chapitre – éclaircir la nature de la logique. Comme le rappelle l’auteur dans son introduction, c’est le contexte de la guerre qui le conduisit à usurper deux fonctions réalisées par un cerveau humain (opérer des calculs et rétroagir sur une conduite pour la diriger vers l’accomplissement d’un objectif) pour réaliser deux dispositifs électromécaniques (calculateur électronique et dispositif de tir anti-aérien). Dès lors c’est aux mécanismes de l’association des idées que Wiener s’attaque dans le chapitre 6 (« Gestalt et universaux ») en montrant qu’il est possible d’assigner des mécanismes neuronaux aux deux principes cardinaux s’association : la contiguïté et la ressemblance. L’enjeu de ce chapitre est le transcodage de l’information transmise par un sens (par exemple l’ouïe) à un sens déficient voire quasi détruit (par exemple la vue). Il ouvre ainsi à un problème de génie biomédical : celui de la fabrication de prothèses sensorielles. Les deux derniers chapitres traitent quant à eux respectivement du problème de l’apprentissage et de la reproduction chez les machines et les systèmes vivants (chapitre 9 : « Apprentissage et autoreproduction des machines ») et d’un système d’auto-organisation particulier : l’auto-organisation des ondes cérébrales (chapitre 10 : « Ondes cérébrales et auto-organisation »). La lecture de ce livre foisonnant d’idées novatrices nous fait constater que Wiener a exploré en pionnier nombre des grands pans de la recherche scientifique du XXIe siècle. – Présentation de l’édition française par Ronan Le Roux, pp. 11-54 ; Introduction de Norbert Wiener, pp. 55-96 ; Préface à la seconde édition de 1961 par Norbert Wiener, pp. 345-358 ; Index, pp. 359-370 ; Table des matières, p. 371.

F. F.