Philosophy of Epidemiology

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Monographie

Résumé

Français

L’épidémiologie, habituellement définie comme l’étude de la distribution et des déterminants de la maladie et d’autres états de santé dans les populations humaines – avec l’objectif d’améliorer la santé de ces populations –, a été largement négligée par les philosophes des sciences. Ce livre est la première étude philosophique approfondie des fondations conceptuelles de cette discipline. L’auteur met toutefois en garde : ce « livre ne relève pas d’une forme de territorialisme intellectuel ». Des questions centrales de la philosophie générale des sciences sont clairement abordées tout au long du livre (explication, inférence inductive, causalité, prédiction) et la façon de les traiter est précisément renouvelée par la spécificité de l’épidémiologie. Le principal argument du livre repose sur le constat que les débats philosophiques et méthodologiques, à la fois à propos et à l’intérieur de l’épidémiologie, se sont trop concentrés sur la causalité et l’inférence causale aux dépens de l’explication et de la prédiction. L’épidémiologie est alors analysée comme une discipline qui cherche à expliquer la mauvaise santé. Broadbent s’appuie sur le modèle contrastif de l’explication, modèle emprunté à un autre philosophe, Peter Lipton. On trouve un bref résumé au début de chaque chapitre, un index et un glossaire très utiles pour ceux qui ne sont pas familiarisés avec le vocabulaire de l’épidémiologie. Les chapitres 1 et 2 constituent une introduction à l’ensemble du livre : y sont défendues l’importance d’une philosophie de l’épidémiologie et la signification que prennent certains problèmes philosophiques fondamentaux (induction, inférence causale) dans le contexte de l’épidémiologie. Il est montré que l’épidémiologie est concernée par le problème descriptif de l’induction, c.à.d. le fait de distinguer les bonnes et les mauvaises inférences, plutôt que par celui de sa justification. Pour aborder ce problème descriptif, la causalité est pertinente. Les chapitres 3 à 7 « fournissent un cadre théorique pour l’analyse des défis conceptuels que soulève l’épidémiologie ». Les épidémiologistes s’intéressent à la question de la causalité en raison de ce que l’auteur désigne comme le « Problème de l’Interprétation Causale (CIP) », c.à.d. le fait que, quand on utilise des mesures de force d’association comme des mesures indiquant la force causale, on ajoute quelque chose (au-delà des mathématiques). Pour résoudre ce problème, une approche explicative basée sur le modèle contrastif de l’explication apparaît plus pertinente que les approches probabilistes et contrefactuelles de la causalité. Après avoir critiqué la dangereuse métaphore que constitue la « recherche translationnelle », l’auteur défend l’idée que pour être utilisables, les inférences causales en épidémiologie doivent être stables. Il propose alors quelques normes permettant de baliser l’acceptation d’un résultat comme stable. Les chapitres 6 et 7 traitent de la manière dont les inférences causales doivent être utilisées pour autoriser de bonnes prédictions. Après avoir critiqué l’Erreur Causale, qui consiste à ne pas faire de différence entre l’inférence causale et l’inférence prédictive, l’auteur souligne qu’une bonne prédiction est toujours une activité fondamentalement contextuelle et doit plutôt être définie comme une tâche explicative. Ce dernier modèle de la prédiction est alors distingué de ceux qui reposent sur l’extrapolation, l’inférence à partir de lois de la nature et la connaissance de mécanismes sous-jacents. Les chapitres 8 à 10 se concentrent sur des questions spécifiques liées au cadre conceptuel ou méthodologique de l’épidémiologie. Le statut causal de la notion de « risque attribuable » est particulièrement confus. L’auteur propose de la distinguer de la notion de « fraction étiologique » plus engagée sur le plan de la causalité et de clarifier son statut causal en interprétant « attribuable » comme signifiant « expliqué par ». Le « relativisme du risque », c.à.d. la tendance à préférer des mesures relatives plutôt qu’absolues est aussi analysé et critiqué. Le chapitre 9 propose un modèle contrastif de maladie qui résout certaines des difficultés et limites du modèle monocausal et du modèle multifactoriel. Le dernier chapitre clarifie l’usage des données épidémiologiques dans le contexte législatif. Dès lors, en plus d’être un livre pionnier en philosophie de l’épidémiologie, il propose une analyse critique pertinente et très stimulante de certains aspects de l’épidémiologie contemporaine comme la tendance à donner plus d’importance aux mesures relatives sur les mesures absolues et ce qu’on peut appeler le « multifactorialisme ».

E. G.

Anglais

Epidemiology, usually defined as the study of the distribution and determinants of disease and other health states in human populations – for the purpose of improving the health of those populations –, has largely been neglected by philosophers of science. This book is the first comprehensive philosophical treatment of the conceptual foundations of this discipline. The author alerts us to the fact that the ‘book is not an exercise in intellectual territorialism’. Core issues in the philosophy of science are clearly dealt with throughout the book (explanation, inductive inference, causation, prediction) and new ways of tackling them are brought to light thanks to the specificities of epidemiology. The main unifying theme is that in the philosophical and methodological discussion in and on epidemiology too much importance has been given to causation and causal inference over explanation and prediction. Epidemiology is described as a discipline that seeks to explain ill health. Broadbent relies on the contrastive model of explanation developed by another philosopher: Peter Lipton. At the beginning of each chapter a brief summary is offered. We also find an index and a useful glossary for those who are not familiar with the epidemiological vocabulary. Chapters 1 to 2 offer an introduction to the book as a whole, highlighting the importance of philosophy of epidemiology and the significance for epidemiology of some deep philosophical problems (induction, causal inference). It is argued that epidemiology is concerned by the descriptive problem of induction, i.e. distinguishing good from bad inferences, rather than the justificatory one, and that for dealing with the former, causation is helpful. Chapters 3 to 7 ‘supply a theoretical framework for the analysis of conceptual challenges in epidemiology’. The main reason why epidemiologists worry on causation is explained by what is called the ‘causal interpretation problem’ (CIP), i.e., the fact that there is an extra ingredient (beyond the mathematics) in using measures of strength of association as measures of causal strength. An explanatory approach based on the contrastive model of explanation is proposed as more promising in answering the CIP than the probabilistic and the counterfactual approaches of causation. Rejecting the dangerous metaphor of ‘translation research’, the author argues that stability is the property that must satisfy causal inferences in epidemiology in order to be usable. Standards for reasonably accepting a result as stable are then proposed. Chapters 6 and 7 deal with the correct manner causal inferences should be used to make predictions. After denouncing the Causal Fallacy, the ‘failure to see that prediction is an inferential exercise distinct from causal inference’, a good prediction is described as a fundamentally contextual activity and is defined as an explanatory task. This model of good prediction is contrasted with other candidates such as extrapolation, inference from laws of nature and knowledge of underlying mechanisms. Chapters 8 to 10 focus on specific issues arising in parts of the methodology or conceptual framework of epidemiology. Broadbent argues that the relation between the notion of ‘attributable risk’ and causation requires clarification. He thus proposes to distinguish attributable risk from ‘etiological fraction’, which has more causal connotations, as well as to clarify the causal significance of the attributability by interpreting ‘attributable’ as meaning ‘explained by’. The risk relativism, i.e., the tendency to prefer relative to absolute measures of risk, is also analysed and criticised. A contrastive model of disease is proposed that solves some of the difficulties and limits of the monocausal and the multifactorial models. The last chapter clarifies the proper use of epidemiological evidence in legal settings. Thus, besides being a pioneering book on philosophy of epidemiology, it delivers a stimulating and relevant critical analysis of certain aspects of contemporary epidemiology, such as the tendency to give more importance to relative over absolute measures of risk and to a kind of ‘multifactorialism’. – Contents, vii-ix ; Preface, x-xi ; Series Editor’s Foreword, xii-xiii ; Acknowledgements, xiv-xv ; List of Abbreviations, xvi ; Glossary, xvii-xxi ; List of Cases, xxii ; Notes, pp. 183-188 ; References, pp. 189-196 ; Index, pp. 197-203.

E. G.